mercredi 27 avril 2011

Petite

 
Tu t’accroches aux arbres penchés
Tu ne sais pas qu’ils sont toxiques
Poisons
Tu bois
Petite
La sève
L’encre qui coule de mon bras
Les mots amers
La poussière des paillassons
Imprudente
Petite
Tu es
Buvard
Tu bois
Les larmes des autres
Substances chimiques
Paroles en l’air
Dans les poubelles
Les restes
Petite
Tu ramasses tout
Fais des tas
Construis sur nos ordures
Des mondes
Que nous ne verrons pas

jeudi 21 avril 2011

Ta vie, liquide

Il te faut, l’intervention de l’eau
T’accrocher, à ta vie liquide
Effacer les plis
Enlever les creux
Le thé 
Qui défroisse les fantômes
Le bain
Qui redonne forme
Ce bain
Dont tu sors en pleurant
Chassé du ventre
Mais l’eau
Quand même
Avant de retourner
Solide
Te planter dans le jour


mardi 19 avril 2011

Couper la radio, la télé, fermer les journaux, lire un poème au hasard

 Le secret de la situation politique

Les Ouménés de Bonada ont pour désagréables voisins les Nippos de Pommédé. Les Nibbonis de Bonnaris s'entendent soit avec les Nippos de Pommédé, soit avec les Rijabons de Carabule pour amorcer une menace contre les Ouménés de Bonnada après naturellement s'être alliés avec les Bitules de Rotrarque ou après avoir momentanément, par engagements secrets, neutralisé les Rijobettes de Billiguettes qui sont situés sur le flanc des Kolvites de Beulet qui couvrent le pays des Ouménés de Bonnada et la partie nord-ouest du turitaire des Nippos de Pommédé au-delà des Prochus d'Osteboule.
La situation naturellement ne se présente pas toujours d'une façon aussi simple: car les Ouménés de Bonnada sont traversés eux-même par quatre courants, ceux des Dohommédés de Bonnada, des Odobommédés de Bonnada, des Orodommédés de Bonnada et enfin des Dovoboddémonédés de Bonnada.
Ces courants d'opinion ne sont pas en fait des bases et se contrecarrent et se subdivisent comme on pense bien, suivant les circonstances, si bien que l'opinion des Dovoboddémonédés de Bonnada n'est qu'une opinion moyenne et l'on ne trouverait sûrement pas dix Dovoboddémonédés qui la partagent, et peut-être pas trois, quoiqu'ils acceptent de s'y tenir pour quelques instants pour la facilité, non certes du gouvernement, mais du recensement des opinions qui se fait trois fois par jour, quoique selon certains ce soit trop peu même pour une simple indication, tandis que, selon d'autres, peut-être utopistes, le recensement de l'opinion du matin et de celle du soir serait pratiquement suffisant.
Il y a aussi des opinions franchement d'opposition, en dehors des Odobommédés. Ce sont celles des Rodobodébommédés, avec lesquels aucun accord n'a jamais pu se faire, sauf naturellement sur le droit à la discussion, dont ils usent plus abondamment que n'importe quelle autre fraction des Ouménés de Bonnada, dont ils usent intarissablement. 

Henri Michaux

vendredi 15 avril 2011

Passer la journée

Pisseur
Passant empestant la vinasse
Tu salues la jeune femme qui s’enfuie
Traces au sillon jaune ta dernière cuite
Et ton chien ne dit rien
Demain tu reviendras traîner près des grillages
Écouler ta boisson
Parler aux hirondelles
Caresser ton chien
Compter les moutons
Attraper du mouron
Ce sera encore une journée de moins

mercredi 6 avril 2011

Dancefloor


Une femme rousse chaussée de bottes blanches marche devant moi
Ce sont les restes de la nuit
Le monde enfoui
Qui surgit en plein jour
Plus aveuglant que le printemps
J’en oublie le ciel bleu
J’en boirais presque une vodka
Un truc fort
Et j’irai dare-dare sur le dancefloor
En découdre avec cette rousse qui se trémousse